Documentaire sélectionné dans la catégorie Archives de la parole de la BnF (Phonurgia Nova Awards 2017).
Il est disponible et ré-écoutable sur le site de la radio
L'un était footballeur,
une autre musicienne, lui revenait d'une soirée arrosée, une autre
allait au travail, tôt le matin. L'une se souvient du pantalon
qu'elle portait, une autre de l'odeur du bitume. Le documentaire
reprend le fil des souvenirs de ces quatre personnes, avant
l'accident, pendant et après. Elles évoquent ce qu'elles ont perdu,
ce qu'elles ne pourront plus faire, la manière dont leur vie a été
transformée et ce qu'elles ont réalisé depuis. Chacun retrace les perceptions de son corps et la transformation de ses propres désirs.
"Elle
m'écrit
me parle des chambres
partagées, des respirations qui se répondent
sur les portes des
poignées basses
Elle
m'écrit
Mon lit est comme une
île le sable très blanc et j'attends qu'on vienne me chercher
C'est un lit pour une
personne, ma fille peut juste s'asseoir à côté de moi
Mon
lit est toujours défait toujours brûlant"Laura Tirandaz
© Lou Camino / Hans Lucas
Des ateliers d'écriture...
Durant quelques séances,
j'ai animé des ateliers d'écriture dans un centre de ré-éducation,
la clinique IRIS de Marcy l’Étoile. J'ai
rencontré beaucoup de personnes, parfois très jeunes. Certains
devaient tout revoir, leurs choix, leurs projets. Dans ce lieu
atypique des IRIS, on
dort, on mange, on rêve de ce que l'on fera après, ou même de ce
qu'on pourrait être en train de faire si, seulement si, ce n'était
pas mal tombé, la chute, le crash, l'accident. Et quand on a du
temps libre, on s'occupe, on lit, on a des visites, du courrier, on
écrit aussi, on cherche à se confier. Des trajectoires qui se
croisent,
des proximités folles sans pour autant être amis, des confidences,
et même un peu de drague entre deux béquilles.
Et des songes...
Certains
patients restent des jours voire des semaines, alités, sans pouvoir
sortir du lit. La
maladie imprime un autre temps à notre quotidien, elle ralentit,
elle densifie les minutes qui sinon s'écouleraient sans heurt, sans
qu'on sente que le temps passe.
Quels
sont
ces moments d'évasion, ces paysages intérieurs qui peuplent ce temps de l'alitement, cette
attente ? Au fil des rencontres, j'ai entendu toute une séries de
rêves, d’hallucinations, et le documentaire est traversé de ces
témoignages hors micros. Tout ce que je n'ai pas pu enregistrer, je
l'ai écrit, restitué et ces textes rythment le documentaire, comme
un refrain.
"Elle
m'écrit
me parle des chambres
partagées, des respirations qui se répondent
sur les portes des
poignées basses
Me
parle des hallucinations parfois, la morphine...
Cette
femme qui voyait des toiles d'araignées aux fenêtres et se
plaignait de ne plus voir la lumière du jour, elle disait que les
insectes tissaient vite
Elle
m'écrit
Mon lit est comme une
île le sable très blanc et j'attends qu'on vienne me chercher
C'est un lit pour une
personne, ma fille peut juste s'asseoir à côté de moi
Mon
lit est toujours défait toujours brûlant"
LT
Remerciements à
Nadine Fossier-Varnet, Corinne Klein et David Ruf ainsi qu'à tout le
personnel de la Clinique IRIS.